Qu’ils vous souviennent chers camarades des différents cas que nous avions eu à traiter en classe avec le professeur au cours de nos deux séances sur les OBNL, dont l’objectif était de défendre son organisme à but non lucratif auprès de nos camarades étudiants représentant « les bailleurs de fonds ». Dans ce deuxième dépôt il nous paraît intéressant d’aborder spécifiquement les différents modèles d’évaluation sur lesquels les organismes à but non lucratif s’appuient pour rechercher du financement auprès des bailleurs de fonds ou des généreux donateurs. Pour y arriver nous avons jugé pertinent de nous appuyer sur les travaux de Micheline Renaud et Maudeline Brésil (2006).
La majorité des évaluations menées dans le secteur à but
non lucratif et fondées sur les approches d’évaluation traditionnelles portent
sur les programmes ou sur les projets. Ces évaluations procurent de nombreux
avantages dans le sens qu’elles aident l'organisme à modifier et à améliorer
ses programmes. Elles améliorent aussi le soutien communautaire supportant
l’offre de service par l’organisme. Cependant, avec cette façon de procéder, il
est plus difficile de savoir et de juger ce qui se passe à l’arrière-plan du
système organisationnel. Bien souvent les bailleurs de fonds préfèrent financer
des programmes distincts plutôt que l’organisme dans son ensemble et exigent
que les évaluations portent uniquement sur ces programmes, ce qui explique
qu’un programme peut très bien fonctionner alors que certaines fois l’organisation
responsable peut être en difficulté. La performance de l’organisation est
évaluée par rapport au budget approuvé pour les projets.
Selon la publication de CMA Canada intitulée[1] «
Application et mise en œuvre du tableau de bord équilibré », les indicateurs
financiers traditionnels de la performance ne fournissent pas aux différents
intervenants (bailleurs, employés, responsables) toute l’information dont ils
ont besoin pour prendre des décisions stratégiques ou courantes éclairées. Ce
dont ils ont besoin, c’est d’un ensemble d’indicateurs financiers et non
financiers qui portent sur la clientèle, les processus internes,
l’apprentissage organisationnel, la qualité, les relations avec la
collectivité, etc.
L'énoncé de mission d'un organisme à but non lucratif est
particulièrement important en ce qu’il permet d’expliquer l'allocation de
ressources en fonction des actions et des résultats et devient substitut au
bilan (Bart, 1998). L'intérêt d'avoir, pour l'organisation, un énoncé de
mission qui reflète les résultats tient au fait que chaque organisation peut se
donner l'image qu'elle souhaite à partir de son mandat. Le revers de la
médaille est qu'il n'existe pas, pour les OBNL, un ensemble d'indicateurs de
performance jouant le rôle de bilan qui soient normalisés et acceptés,
comparables aux indicateurs financiers des entreprises à but lucratif.
Nous pouvons donc dire, l’application de systèmes de
management novateurs, tel le tableau de bord équilibré et de type prospectif
qui utilise des renseignements financiers et non financiers pour mesurer la
performance, permet aux organisations d’améliorer plus rapidement, et de façon
continue, leur performance, de faciliter l’élaboration et l’exécution de la
stratégie et de renforcer la transparence interne et externe en vue de la
création de valeur.
Référence: Kaplan & Norton (2001) « tiré du cours de Jean-François
Henri »
De même le recours à un bon système d’évaluation peut
permettre de présenter un projet de façon plus convaincante aux bailleurs de
fonds ou aux généreux donateurs, car plus on fournit des preuves probante
montrant la performance de l’organisation, plus il y a des chances que les
demandes de financement que l’on présente soient acceptées.
Les responsables des organisations à but non
lucratif peuvent utiliser le tableau de bord équilibré pour concevoir la stratégie,
en communiquer les détails, encourager le personnel à exécuter les plans et
permettre aux dirigeants et aux administrateurs de surveiller les résultats.
Puisque dès le départ l’objectif du tableau de bord équilibré consiste à créer
une liste d’indicateurs qui indiquent à tous les responsables et employés ce qu’ils
doivent faire pour collaborer à la réalisation de la stratégie de l’organisation
Les indicateurs
devraient refléter la performance financière ainsi que la performance à l’égard des axes non financiers, comme
la clientèle, les employés, les processus d’affaires internes ou
l’apprentissage.
Nous pouvons, nous demander au vue de tous cela quels
sont les avantages et les inconvénients de l’application du tableau de bord
équilibré et prospectif de Kaplan et Norton dans le contexte d’un OBNL?
Avantages du
tableau de bord prospectif dans les OBNL
- Permet d’aligner la stratégie avec les éléments clés de performance à tous les niveaux d’une organisation; Favorise l'adoption d'une approche globale en matière de gestion
- Fournit à la direction une vision claire et globale de leurs activités;
- Aide les organismes sans but lucratif à communiquer leurs résultats dans un langage intelligible pour l’ensemble des parties prenantes de l’organisme, incluant les parties prenantes non initiées aux activités de l’organisme;
- Oblige les organismes à énoncer des objectifs clairs et à repenser la stratégie adoptée pour atteindre ces objectifs;
- Facilite la communication et la compréhension des objectifs stratégiques à tous les niveaux d’une organisation;
- Permet à l'organisation de découvrir ses forces et d’amorcer son cheminement vers l'excellence; Améliore les communications organisationnelles;
- Uniformise l'orientation de l'organisation et établit un consensus sur les tâches à accomplir.
Les inconvénients du tableau de bord prospectifs dans les
OBNL
Le tableau de bord appliqué dans le secteur des
organisations à but non lucratif comporte plusieurs limites
- Exige que la stratégie soit explicite et partagée à tous les niveaux de l’organisation;
- Limite du TBP essentiellement culturelle. Toutes les entreprises ne sont pas prêtes à communiquer, à tous les niveaux de la hiérarchie, leurs objectifs visés comme ceux réalisés;
- Dans les organisations à but non lucratif, le tableau de bord prospectif se fonde sur une méthode un peu rigide;
- A l’ambition de couvrir l’ensemble des éléments de la stratégie de l’organisation et risque de se traduire par une approche un peu « fourre-tout » et donc difficilement lisible et exploitable.
Autres modèles : le modèle d’impacts des intrants et le modèle
des mesures de performance
Dans ce modèle l’axent est particulièrement mis sur la
mission, la vision ainsi que l’amélioration de la qualité de vie des personnes, des membres et les différents
contributions orientées vers la société. Il met également en exergue
l’environnement interne, la stratégie, la structure et les ressources comme
étant des intrants. Puisque pour
atteinte les objectifs fixés, les OBNL sont parfois obligé de disposer des
ressources pour la bonne conduite de leur mission. Notons qu’il existe une
relation de cause effet entre les intrants et extrants, les activités, les
impacts et les résultats. Cela permettra à la haute direction et aux
gestionnaires de prendre des décisions
adéquates.
Référence: Sawhill & Williamson (2001) « Tiré du cours de Jean-François Henri »
En ce qui concerne, le modèle des mesures de performance
« famille des mesures » et telle j’ai eu à le souligné dans mon premier dépôt, ce modèle peut être utilisé par n’importe
quel OBNL en s’appuyant sur un certains nombre de paramètres pour mobiliser des
ressources, et s’assurer de l’efficacité du personnel à travers leur rendement.
Dans ce modèle les indicateurs financier
ont un caractère pertinent car il joue un rôle important dans la prise de
décision des gestionnaires, mais ne réussissent pas à refléter la performance des
OBNL. Pour finir je dirai que le choix des indicateurs de performance est très
important dans les OBNL.
[1] Robert W. Dye,
“L'orientation stratégique, Indicateurs de la réussite : mettre en pratique ce
que nous prêchons », Hiver 2000, volume 2, partie 1.
Je trouve que votre billet fait bien ressortir la grande problématique entourant la mesure de la performance des OBNL. En effet, on ne peut pas évaluer la performance des OBNL comme on évaluerait celle d’un organisme à but lucratif. Alors que ce type d’organismes existe en premier lieu pour faire des profils, les OBNL ont une vocation tout autre et sans cette vocation, ils perdent leur raison d’exister. Il est donc tout à fait normal que la performance des OBNL soit évaluée en fonction de leur mission. Par contre, il peut être difficile d’appliquer cela dans la réalité. En effet, la mission des OBNL est souvent de nature intangible et il est donc difficile de mesurer l’atteinte de cette mission si l’organisation ne se sert que de mesures financières. Des études réalisées auprès d’OBNL, comme celle de Johanne Turbide et Claude Laurin (2009) réalisée dans le domaine des arts, viennent montrer que beaucoup de gestionnaires d’OBNL se basent beaucoup plus sur des mesures financières pour évaluer la performance de leur organisme. Cependant, comme vous le mentionné, il est essentiel de passer par une série de mesures financières et non financières pour bien évaluer la performance des OBNL. Également, comme le souligne un article de Jessica E. Sowa, Sally Coleman Selden & Jodi R. Sandfort (2004), il est essentiel de passer par une évaluation multidimensionnelle lorsqu’il est question de la performance des OBNL.
RépondreEffacerLes trois outils que vous proposez viennent vraiment chercher ce caractère multidimensionnel. En effet, si on prend pour exemple le tableau de bord équilibré de Kaplan et Norton, on peut voir que les mesures financières et non financières sont aussi importantes et qu’elles doivent être prises ensemble pour avoir une vision globale de l’organisation. Également, le TBE permet de tenir compte du caractère double concernant les clients des OBNL. En effet, les personnes qui apportent des fonds à l’organisme ne sont habituellement pas les mêmes que celles qui vont recevoir le service ou le bien. Il y a donc, d’un côté, le bénéficiaire et de l’autre, le donateur. Des informations doivent être communiquées aux anciens donateurs pour leur montrer que l’organisation pour lequel il a contribué performe bien. De plus, des informations doivent être aussi transmissent aux donateurs potentiels pour leur convaincre de donner. Ensuite, les mesures non financières du tableau de bord équilibré permettent à l’OBNL de s’assurer que les bénéficiaires de ses services sont satisfaits de ces derniers.
Pour finir, un des autres caractéristiques intéressantes des trois outils que vous avez proposés est qu’ils peuvent aider l’organisme à se recentrer sur sa stratégie. En effet, la mise en place de ces outils oblige l’OBNL à s’interroger sur sa stratégie et à bien la formuler ou la reformuler. Que l’organisme ait ou non pour but de faire de l’argent, il n’en demeure pas moins que la stratégie est très importante. Les outils décrits viennent aider l’OBNL en lui permettant de se réaligner vers sa stratégie et cet alignement est important lors de l’élaboration de mesures de performance qui seraient adéquates pour l’organisme.
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EffacerMerci Patrick pour ta contribution. Tes divers analyses sur le sujet sont très pertinentes et nous laisse croire une fois encore que les gestionnaires se servirons de ce blog pour améliorer leurs pratiques au quotidien à travers les outils proposés par des éminents chercheurs en comptabilité de management.
EffacerBonjour et merci pour cet article qui dresse bien le bilan d’une problématique propre à la nature de l’OBNL vs. L’entreprise classique dont le but est de réaliser des profits.
RépondreEffacerJe pense qu’une clé de compréhension est de se mettre du point de vue des apporteurs de fonds. Il y’a une distinction forte des attentes entre un apporteur de capital ou un préteur dans une entreprise (actionnaires, banques) de ceux d’une OBNL (donateur, institutions).
Dans l’entreprise classique, l’actionnaire est préoccupé de savoir si l’entreprise dans laquelle il investit gère assez bien son activité pour produire un rendement intéressant. Il en découle l’importance des ratios financiers tel ROE, Fond de Roulement, etc.
Dans le cas d’une OBNL, le donateur, pour qui l’important est de « faire un geste », fait souvent jouer son affect dans sa décision de don et il est vrai qu’il sera souvent plus attiré par un programme ou une action particulière que par l’organisation dans son ensemble. Encore moins de connaître la performance organisationnelle de celle-ci. Il n’attend pas non plus un retour sur son investissement. Ou du moins pas un retour monétaire. Il s’attend à avoir contribué à une cause, aux missions de l’OBNL. Ainsi on comprend tout l’intérêt des mesures de performance portées sur les missions.
Pour ma part, en tant que donateur, ce qui m’intéresserait serait également de connaître la véritable part de mon don qui contribue au programme et à la mission de l’OBNL. Ainsi un ratio (Frais administratifs)/(Total des dons) me montrant la part de dons qui part dans la gestion organisationnelle courante de l’OBNL m’intéresse. Si une OBNL consomme 90% de ses ressources en frais de gestion courant, je serais quelque peu démotivé de leur donner mon argent pour payer leur lunch !
Matthieu
Tout à fait d'accord avec toi. Dans le cadre d'une OBNL, le donateur fait son geste par orgueil, l'aspect financier passe au second plan. Je tiens cependant à ternir un peu l'ambiance en ajoutant que derrière les bons sentiments et l'amour de son prochain se trouvent bien souvent des considérations marketing et financières moins avouables. Le crédit d'impôt étant un moteur de motivation relativement efficace. De plus, les OBNL n'hésitent pas à négocier des "endorsements" d'entreprises à l'image discutable en échange de chèques nécessaires à leur survies.
EffacerMathieu
Bonjour,
RépondreEffacerSuite à la lecture de votre article je trouve que c’est un sujet très pertinent. En effet, je veux faire un petit récapitulatif de ce que tu as mentionné. Tout d’abord l’information publiée à des fins d’analyse ne se rapporte pas nettement à la mission. Les indicateurs financiers sont essentiels afin de connaître l’efficience de l’utilisation des ressources, la croissance des revenus, le niveau de réussite des divers programmes de l’organisme. De plus, il aide les donateurs à faire des choix «en leur fournissant de l’information sur la santé financière des organismes de bienfaisance» (Charity Navigator, 2006).
Le premier modèle de mesure est le tableau de bord. Le deuxième modèle de mesure de performance est le modèle d’impacts des intrants qui met l’accent sur la mission et la vision de l’organisme, les ressources, l’environnement, la stratégie, la structure et les systèmes comme des intrants. Alors que les extrants de l’organisme prennent la forme des produits et services qu’on peut répartir entre les extrants internes et externes (le deuxième tableau de ton billet).
Le dernier modèle de mesures de performance est la famille des mesures qui peut être utilisée par n’importe quel OSBL, mais le problème est que les paramètres choisis pour estimer les performances dans les trois catégories vont différer d’un organisme à une autre.
« Les OBNL et les conseils doivent mieux comprendre les donateurs d’aujourd’hui. Ils ne peuvent pas supposer que les niveaux actuels de philanthropie ne changeront jamais. Bon nombre d’entre eux doivent modifier considérablement leurs stratégies de collecte de fonds pour assurer leur viabilité financière durable. » Yuri Fulmer, président United Way of the Lower Mainland 1
Un autre point très intéressant à aborder est celui des responsabilités du conseil. Le conseil d’un OBNL dit comprendre ces obligations qui sont fixées par la loi. Pouvez-vous me parler des objectifs du conseil d’OSBL? Selon toi, quelle méthode d’évaluation serait la meilleure par le système de santé par exemple?
Sources :
1 https://www.cas.ulaval.ca/files/content/sites/college/files/documents/references/Deloitte-OBNL-2013.pdf